Qu'est ce qu'un "grand branchiopode" ?
Les Branchiopodes Branchiopoda, une classe des Crustacés Crustacea, regroupent des petits animaux vivant en eau douce ou salée.
Les "Grands branchiopodes" forment un regroupement arbitraire, qui ne retient que quelques ordres parmi toutes ces espèces (signalés en ocre dans l'arbre de vie ci-dessous) :
Phylum Arthropoda (les arthropodes)
- Sous-phylum Crustacea (les crustacés)
- Classe Branchiopoda (les branchiopodes, "au sens large")
- Sous-classe Phyllopoda
- Ordre Diplostraca
- Sous-ordre Cladocera (les cladocères : très nombreuses espèces dont les daphnies ou puces d'eau...)
- Sous-ordre Laevicaudata (non connus en Alsace)
- Sous-ordre Spinicaudata (1 espèce en Alsace)
- Ordre Notostraca (2 espèces en Alsace)
- Sous-classe Sarsostraca
- Ordre Anostraca (2 espèces en Alsace)
Une vingtaine d'espèces de grands branchiopodes ont été identifiés en France métropolitaine. Même si elles restent globalement encore trop méconnues, toutes ces espèces sont peu fréquentes, voire très rares.
Beaucoup sont en effet associées à des milieux temporaires, parfois de taille minuscule. Leurs oeufs résistent à une dessication prolongée, et leur apparitions peuvent, de fait, être très irrégulières.


Élusifs, à la silhouette féérique, souvent rencontrés là où on s'y attendait le moins... il n'en faut pas plus pour en faire des créatures aussi mystérieuses qu'intrigantes [Triops cancriformis et tête de Branchipus schaefferi]
En savoir plus
Le site de Nicolas Rabet
La galerie photo de Jean-François Cart, qui a réalisé toutes les photos d'espèces de cette page
La forum branchiopodes de TelaInsecta
Le site de l'ONEM
Les grands branchiopodes en Alsace
Voir également à la liste rouge des branchiopodes d'Alsace
Branchipus schaefferi Fisher, 1834 et Eubranchipus grubii (Dybowski, 1860)
Ces deux espèces proches ressemblent à des petites crevettes de 1 à 3 cm, nageant sur le dos.
Leur identification se fait par les antennes (mâles) et la forme du sac ovigère (femelles).
E. grubii semble le plus répandu des grands branchiopodes d'Alsace. Il est surtout connu des forêts du Nord du Bas-Rhin (Mundat, Haguenau, Herrenwald, Ried Nord) mais aussi du Bruch de l'Andlau et du Ried de la Bruche. Il est à chercher dans tous les massifs forestiers de plaine (dont le Sundgau et l'Alsace Bossue) ou des Vosges du Nord.
Il est surtout observé en fin d'hiver (mars-avril), dans des fossés et dépressions (le plus souvent forestiers) mis en eau par remontée de nappe, et disparait avec la montée des températures printanières. L'éclosion des oeufs nécessite la prise en glace de la surface de la mare.
B. schaefferi parait beaucoup plus rare. Il se cherche au printemps ou en été, et prèfère les mares et ornières ensoleillées remplies par les pluies. Il était connu du Bruch de l'Andlau, du Ried noir et le long du Rhin à Strasbourg. Egalement donnée ancienne probable à confirmer en plaine haut-rhinoise. Mais il n'a été observé récemment que sur les collines calcaires de Molsheim

Le mâle de Branchipus schaefferi vu d'en haut (il nage sur le dos !)

Le mâle de Branchipus schaefferi vu de profil.

La femelle de Branchipus schaefferi vu de profil, son sac ovigère contenant les oeufs, très coloré, est bien visible.

Ornière en eau (moins de 10 cm) sur sol calcaire : habitat de Branchipus schaefferi dans le Bas-Rhin.

Le mâle de Eubranchipus grubii vu d'en haut (il nage aussi sur le dos !). C'est l'espèce la plus fréquemment rencontrée.

La femelle de Eubranchipus grubii vu de profil, son sac ovigère contenant les oeufs est bien visible (et bien moins coloré !).
Lepidurus apus (Linnaeus, 1758) et Triops cancriformis (Bosc, 1801)
Ces deux espèces, plus grandes (jusqu'à 10 cm de long), sont également assez semblables. Notez
- la lame anale et les pattes courtes pour le Lepidurus
- l'absence de lame anale et les longues pattes pour le Triops.
Le Triops est plus thermophile, et s'observe surtout au printemps et en été (mai-octobre) dans des mares temporaires ou prairires inondables parfois turbides. Il était principalement connu de la bande rhénane, où il subsiste dans la partie nord.
Lepidurus est surtout printanier (février-avril), et fréquente des mares temporaires aux eaux fraiches, qui peuvent s'assécher plusieurs années de suite. Il n'a été observé récemment que dans le Bruch de l'Andlau et le Ried Centre-Alsace.


Deux vues dorsales de Lepidurus apus

Vue dorsale de Triops cancriformis

Vue ventrale de Triops cancriformis
Limnadia lenticularis (Linnaeus, 1761)
Cette petite espèce (moins de 2 cm) d'Europe centrale et septentrionale n'est connue qu'en Alsace en France.
Elle est principalement estivale, et fréquente les prés inondables de la bande rhénane et de certains rieds.
Elle peut être observée -certaines années en grand nombre- dans quelques sites inondables de la bande rhénane nord.

Comment chercher ?
Mare, marouille, ornière, flaque, dépression temporaire, zone inondable... il convient de jeter un oeil dans tous les milieux stagnants temporaires... même quand on a l'impression qu'il s'agit d'un trou d'eau sans vie, trop petit, trop peu profond, trop sombre... !
Le milieu doit être régulièrement mis en eau (mais pas forcément tous les ans), et est généralement peu profonds.
Il faut simplement se poser au bord de l'eau, et scruter attentivement les petites bêtes de la mare.
Cela peut se faire le jour, mais également la nuit à la lampe.
Lorsque les branchiopodes sont en belle densité, et le milieu pas trop grand ni trop profond, on arrive généralement facilement à les repérer, nageant au milieu des larves de moustiques et autres bestioles.
Si la pièce d'eau est un peu plus grande, fouiller aux jumelles est parfois plus efficace.
Si l'on dispose d'un troubleau, on peut ratisser au hasard n'importe quelle pièce d'eau, et examiner attentivement "ses prises" dans un bac ou le filet.
Lorsqu'on a trouvé une mare à branchiopodes, il convient d'élargir ses recherches en cercles, en fouillant systématiquement toutes les autres pièces d'eau ayant le même fonctionnement hydrologique dans le milieu. Par exemple, si vous découvrez une dépression inondée colonisée dans un ancien chenal, il est souvent efficace de parcourir ce chenal dans son intégralité pour vérifier toutes les autres dépressions en eau.

Mare forestière du Ried Nord (env. 8 x 3 m) alimentée par la nappe, dans laquelle Eubranchipus grubii est connu depuis plus d'un demi-siècle !

Minuscule dépression de 30 cm de diamètre et 1 à 3 cm d'eau... dans laquelle nagent plusieurs Eubranchipus grubii !

Dépression plus importante abritant plusieurs milliers de Eubranchipus grubii.

Recherche au troubleau dans une vaste dépression temporaire marécageuse.
Documenter ses observations
Toutes les observations en dehors de stations déjà référencées doivent être documentées par des photos.
Pour ce faire, le plus simple est de prélever plusieurs individus, si possible des mâles et des femelles, et de les photographier dans un récipient peu profond ou un tube, de face ET de profil.
N'hésitez pas à multiplier les photos d'individus. Merci aussi d'aouter des photos d'habitats.
Toutes les données sont importantes. Même pour les espèces non identifiées, veiller à précisément localiser chaque station.



Femelle de Eubranchipus grubii délicatement attrapée dans un cercle de verre ou un simple bouchon, puis prise en photo dans un tube.
[photos Raynald Moratin]
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